La réponse de Jenna Smith à une nouvelle enquête importante qui suggère que la moitié des Canadiens sont soit agnostiques, soit athées, soit non religieux.
À 13 ans, j'ai demandé la permission de ne plus aller à l'église. J'avais ce que je pensais être une raison très profonde et logique pour cette demande. J'ai invoqué tous mes arguments, depuis « Je dois découvrir qui je suis » jusqu’à « L'église ne m’interpelle plus ». Je pensais que ces arguments étaient profonds et convaincants. La vérité était plus simple : je m'ennuyais et il n'y avait pas de groupe de jeunes.
Mes parents ont catégoriquement refusé ma demande et ce fut la fin de mes revendications.
Il s'est avéré que je n'étais que l'un des nombreux jeunes de 13 ans qui ne voulaient pas aller à l'église le dimanche.
Et maintenant, les évangéliques connaissent le même douloureux déclin que les grandes églises ont connu récemment. Les tendances que nous observons montrent que le christianisme canadien est au bord d'un précipice mortel.
Nous pouvons aborder cette réalité, dans toutes ses nuances, de l'une des trois manières suivantes. La première, un besoin de réinventer, de réimaginer et de refaire frénétiquement l'église vers un brutal réveil pour la sauver d'une mort imminente.
Deuxièmement, nous pourrions adopter une position de déni, en insistant sur le fait que les chiffres sont faux. Nous pourrions soutenir que l'Église a résisté à des épreuves pires, et que nous devons encourager les troupeaux à renouveler leur spiritualité, et alors tout ira bien.
La troisième approche consisterait à réfléchir au précipice de la mort sur lequel nous nous trouvons, et à considérer ce que cette mort peut nous offrir en termes de vie spirituelle, d'appel à la communauté et d'expressions vécues de notre foi.
La troisième approche me paraît la plus logique. Elle est, à tout le moins, la plus intéressante des trois.
Une mise en garde - Je viens du Québec, une province qui a déjà vécu sa Révolution tranquille, qui a entraîné une hémorragie massive de l'Église nationale, emportant avec elle de nombreuses paroisses, institutions d'enseignement et missions. Et je fais partie d'une confession - l'Église anglicane du Canada - qui verra sa fin, si la tendance actuelle se maintient, d'ici 2040 (selon un récent rapport officiel du statisticien Neil Elliot). Ma propre paroisse a fermé en 2016. Je ne regarde pas dans le tunnel. Je suis dedans.
Et mes amis, ce n'est pas si mal. Mais il faut qu'on se parle de certaines choses.
Tout d'abord, je propose que nous cessions de tenir les changements sociaux externes radicaux responsables de ce déclin et que nous considérions que cela a toujours été un problème interne. Si les parents optent pour des cours de ballet, des brunchs familiaux ou des entraînements de hockey au lieu de l'école du dimanche ou du culte de 10 heures, alors il y a quelque chose dans les cours de ballet, les brunchs familiaux ou les entraînements de hockey qui répond à un désir que l'église ne parvient pas à combler.
Je voudrais proposer que cela a toujours été un problème interne.
Le théologien canadien James K. A. Smith explique dans You Are What You Love : The Spiritual Power of Habit (Brazos, 2016 ) que les humains sont des créatures de désir, et que nous suivons ces amours et ces désirs, parfois au détriment des valeurs et enseignements que nous proclamons. Quel désir est comblé par autre chose que la fréquentation hebdomadaire?
Où sont les réflexions et les réponses vécues à cette question même du désir? Que désire notre monde, et pourquoi ne pouvons-nous pas aborder ces désirs de plein front, d'un point de vue centré sur le Christ, en tant que question de l’âme, en cherchant à guérir, à approfondir et à discipliner cette condition même de l'âme?
Nous avons déjà perdu - et nous continuerons à perdre - de la stature et de l'importance dans la société à mesure que le nombre de personnes diminue. Quelle théologie pouvons-nous créer autour de ce phénomène?
Jésus, dans sa parabole du banquet, décrit que beaucoup sont invités à la fête, mais que seuls quelques-uns se présentent. Faut-il commencer à lire ce passage à travers la lentille exégétique de ces nouvelles données? Ceux qui restent engagés envers Christ, malgré l'impopularité, les inconvénients et le manque d'avantages sociaux, font-ils simplement partie des quelques personnes qui ont répondu à l'invitation? Et n'est-ce pas là un signe du Royaume de Dieu? (Et pouvons-nous, s'il vous plaît, passer à la deuxième partie de la parabole et poursuivre les pauvres, les boiteux et les affamés?)
En regardant la mort de la religion dominante telle que nous la connaissons, quels enseignements sur la perte, la mort et le déversement de soi devons-nous commencer à apprendre, à vivre et à incarner? Quiconque perd sa vie à cause de moi la retrouvera, dit Jésus dans Matthieu 10:39. Qu'est-ce que l'Église est prête à perdre - qu'est-ce qu'elle doit perdre - pour trouver ce qui l'attend? Et quelles possibilités cette nouvelle ère de notre vie nous réserve-t-elle une fois que nous aurons perdu les effectifs, l'argent, les bastions institutionnels et le pouvoir?
Comme certains d'entre nous se tiennent sur des plates-formes en flammes, ne serait-il pas temps de songer à essayer de nouvelles formes de collaboration interconfessionnelle, de nouvelles expressions de mission et d'assistance, d’explorer les expressions de la communauté du point de vue de la culture minoritaire? Ne pourrions-nous pas être définis par ceux avec qui et pour qui nous travaillons plutôt que par ceux que nous excluons? Ne serait-ce pas l'occasion de consacrer du temps, des efforts et de l'argent à la poursuite de la sainteté, de la spiritualité et de la formation de disciples plutôt qu'à la chronophage gestion des affaires?
La table est mise pour que nous perdions beaucoup. Mais que pourrait-on gagner?
Qu'est-ce que ce banquet apportera réellement à ceux qui acceptent de s'asseoir à la table aux côtés des boiteux, des pauvres, des estropiés et des opprimés?
Je ne suis pas encore d'âge moyen selon certaines classifications sociologiques. Je suis carrément jeune selon les principales confessions religieuses.
Même sur ce plan, je ne suis pas désespérée. Je ne suis certainement pas apathique. Nous sommes un peuple de la résurrection.
Mais cela signifie que je serai sans doute en position centrale de leadership, à la base ou ailleurs, lorsque ces statistiques de déclin commenceront vraiment à avoir un impact durable sur l'avenir des congrégations. En d'autres termes, ce sera ma génération qui sera chargée de verrouiller les portes.
La fermeture d'églises ou d'autres institutions chrétiennes est une chose à laquelle je pense presque quotidiennement. Envisager mon rôle dans la fermeture ou la transition du christianisme ecclésiastique tel que nous le connaissons occupe une place importante dans mes réflexions théologiques, mes temps de prière, mes conversations sur la mission et mon travail de praticienne.
Je me prépare spirituellement à la grande mort qui est devant nous.
Même sur ce plan, je ne suis pas désespérée. Je ne suis certainement pas apathique. Nous sommes un peuple de la résurrection. La grande mort qui est devant nous signifie que Dieu prendra nos cendres, nos restes, nos bancs vides, les implantations d'église ratées et les péchés de notre christianisme colonisateur, triomphaliste et consumériste entre ses mains. Il prendra nos dotations épuisées, nos agnostiques, nos irréligieux, nos non-participants, nos bénévoles surmenés et fatigués de combattre pour le bien et nos vieilles outres, et Il dira, une fois de plus, « Venez à moi. Je vous donnerai la vie. »
Jenna Smith est la directrice d'Innovation Youth, un ministère du centre-ville de Montréal. Elle est l'auteure de A Way: The Story of a Long Walk (Urban Loft, 2014). Illustration du berger en haut de la page : Bernardo Ramonfaur.
Nous invitons deux Canadiens réfléchis à répondre à « Je ne suis plus chrétien » par Rick Hiemstra. Continuez à lire avec « Donner la priorité à la vocation et faire un pas de foi » de David Johnson.